vendredi 5 février 2010

Seulement 40 000?


Un peu avant la période des fêtes, le député de l'Assemblée Nationale dans la circonscription de Chambly, Bertrand St-Arnaud, a employé un des nouveaux outils de la réforme parlementaire de 2009 afin d'offrir aux députés de lancer en ligne une pétition électronique reconnue par l'Assemblée Nationale, l'objectif étant d'offrir des moyens modernes pour augmenter la présence des représentants du peuple dans la sphère publique (l'Assemblée Nationale ne reconnaissait jusque là que les pétitions sur papier). Dès que cet outil fut mis à la disposition des députés, monsieur St-Arnaud a mis en ligne une pétition pour exiger du gouvernement qu'il mette en place une commission d'enquête publique sur la collusion dans le milieu de la construction.

L'une des contraintes qu'impose l'Assemblée Nationale aux pétitions électroniques est une présence limitée par le temps. En effet, au delà une certaine date, la pétition est retirée du site internet de l'Assemblée Nationale. Aujourd'hui, la pétition de monsieur St-Arnaud a été retirée. Les médias l'ont dit d'une même voix : 40 000 signatures est un bien petit nombre compte tenu de l'unanimité des appuis à la tenue de cette commission.

Mais faut-il vraiment s'en étonner? Bien que l'utilisation des médias électronique soit appelé à être utilisé par la plus jeune génération, cette pratique n'est pas généralisée. Il y a 10 ans, on parlait du clavardage comme une pratique marginale. Depuis, les médias se sont joints dans la mêlée mais cela veut-il dire que la population a fait le saut unilatéralement? Non, bien sûr, car il y a encore plus de gens que l'on crois qui ne font pas un usage courant des médias électroniques. J'aurais été surpris d'apprendre que ma grand-mère vieille de 80 ans ait pu être appelée à aller sur internet malgré l'intensité du scandale qui se déroule dans le milieu de la construction.

Dans son dernier livre La Souveraineté du Québec, Jacques Parizeau rappelle qu'il y a 20 ans, le Parti Québécois avait cumulé environ un million de signatures pour obliger le gouvernement de Robert Bourrassa à maintenir sa promesse de tenir un référendum sur l'avenir du Québec selon une recommandation de la commission Bélanger-Campeau. Comment a-t-il pu y arriver? Les militants ont occupé les centres d'achats, les bouches de métro, les perrons d'église et les assemblées citoyennes. Mais aussi, toute la société civile a mis l'épaule à la roue : les syndicats, les étudiants, les retraités et tous les autres groupes citoyens ont participé à cette campagne de signatures.

Or la leçon demeure que la modernité n'a pas tout sacrifié au nom du virtuel. Les 40 000 signatures sont un indice de l'impact du web sur la société civile. Cela prouve que nous ne sommes pas rendu comme peuple des accros exclusif à tout ce qui se déroule sur internet. Il y a encore moyen de cumuler les appuis en faveur de cette commission d'enquête malgré tout. Seulement, il faudra se résoudre à ne pas négliger d'employer des méthodes éprouvées par le passé. Encore faut-il le vouloir vraiment.