mardi 3 mai 2011

Histoire de la dissolution

«Le Canadien français est, au sens propre et figuré, un agent double. Il s’abolit dans l’"excentricité" et, fatigué, désire atteindre au nirvana politique par voie de dissolution.» - Hubert Aquin, La fatigue culturelle du Canada français

En 2001, dans une partielle dans Mercier, les électeurs déçus du Parti Québecois appuient à 30% des voies le candidat de l'UFP. La candidate libérale est élue.

En 2007, les électeurs déçus du Parti Québécois appuient à la fois Québec Solidaire et l'Action Démocratique du Québec. Le Parti Libéral du Québec est élu minoritaire.

Tous ont réagi à la stratégie du Parti Conservateur du Canada de provoquer des élections fédérales afin d'arracher un mandat majoritaire à la population. Tous les partis d'opposition concèdent des appuis et des sièges aux conservateurs, sauf au Québec où l'appui au Bloc Québécois hausse et empêche le rêve du chef conservateur de se réaliser.

Comme Stephen Harper qui allé rencontrer la Gouverneur Générale Michaëlle Jean pour dissoudre les travaux du parlement, dix jours après l'élection fédérale, Jean Charest demande au lieutenant gouverneur de dissoudre les travaux de l'Assemblée Nationale afin d'arracher un mandat majoritaire. Cette fois, les abstentionnistes, supposément fatigués d'entendre parler d'élection, accorde à Jean Charest de gouverner les coudées franches malgré les scandales appréhendés et confirmés par la suite.

En 2009, incapables de convenir d'une entente de partenariat avec Projet Montréal, Louise Harel ne parvient pas à arracher les reines de la mairie de Montréal à Gérald Tremblay et son Union Montréal accusée à chaud de corruption. Le vote d'opposition scindé entre les deux partis d'opposition permet au maire sortant de poursuivre son œuvre d'une éthique suspecte.

En 2011, les partis politiques fédéraux se préparent à la guerre. Les rumeurs d'élections vont bon train. Elles sont déclenchées par un outrage au parlement causé par le Parti Conservateur exerçant le pouvoir. Dès le début de la campagne, Gilles Duceppe, chef du Bloc Québécois, parle immédiatement de faire front contre les forces de Stephen Harper. Pour le Québec, la question n'était pas de savoir qui allait exercer le pouvoir sur la scène fédérale mais bien qui allait s'opposer aux conservateurs qui avaient l'assurance de remporter encore une fois une majorités de sièges.

Hélas, rien n'y fit. En échangeant son vote d'opposition au pouvoir fédéral par celui proposé par le NPD, jusqu'à maintenant toujours confiné à l'opposition, les Québécois stagnent dans un statu quo qu'ils provoquent eux-mêmes. Comment composer avec ce désir de changement qui n'expose jamais le fondement de ce désir? Avant que ne survienne la défaite du Bloc, on reprochait aux partis de pouvoir des éléments de leur bilan qui leur faisait ombrage, comme si la politique était guidée par des éléments surnaturels de prévision d'avenir. Résultat: la politique est un des seuls domaines où l'expérience est inversement proportionnelle à la confiance populaire. La vague adéquiste de 2007 et la toute récente vague orange sont des exemples criants.

Hubert Aquin croyait que l'essor du Québec reposait sur l'abolition radicale du comportement aliéné de sa population. Son souffle auto-destructeur doit éventuellement consumer véritablement le peuple. Commettre un suicide collectif afin d'en abolir la mémoire, lobotomiser son cancer.

Ce n'est pas une question de confiance envers la politique, c'est une question de confiance envers nous-même. Et combien de martyrs sèmeront-nous au gré de nos feux de paille?

«Les Canadiens français n'ont pas d'opinion, ils n'ont que des émotions.» - Wilfrid Laurier